Vendredi. Nous voilà en terre française. En mettant les pieds sur le sol de
l’archipel, nous faisons connaissance avec un lieu d’une importance historique
unique en Amérique du Nord. Nous y trouvons une Histoire vivante et étonnante,
celle d’une population française par ses origines, sa culture et son contact
permanent avec la France et ses institutions. Depuis le moratoire sur la pêche
en 1992, le principal employeur est la fonction publique.
En juin
1536, quand l’explorateur Jacques Cartier fait escale dans l’archipel, l’île
Saint-Pierre porte déjà ce nom. Dans le
port sont ancrés des navires de pêche français. Plus tard, la France fonde
l’Acadie. C’est de cette double histoire, celle de la pêche française et celle
de l’Acadie, qu’est issue la population actuelle de Saint-Pierre et Miquelon.
Les Saint-Pierrais, les Miquelonnais portent des noms qui viennent de Bretagne,
du Pays Basque, de l’Anjou, du Poitou et de la Normandie. A la différence des
Acadiens, ils n’ont pas eu à prêter allégeance à un autre pays, ils sont
toujours là, Français sur leurs îles et ça dure depuis près de 500 ans.
Dès notre
arrivée à Saint-Pierre, nous retrouvons l’accent français qui nous est familier
de par nos amis de la Normandie et de Charente-Maritime. Nous avons bien une
carte de Saint-Pierre pour nous aider à nous rendre à notre chambre d’hôte, chez
Madame Dodeman, mais bien des rues n’ont pas de nom et vont dans tous les sens.
En demandant l’aide de passants, ce n’est pas plus facile car ils ne
connaissent pas les rues par leurs noms, mais ils connaissent Madame Dodeman.
« Vous montez cette rue, vous tournez à gauche, puis encore deux rues et
vous tournez à droite et vous devrez y arriver ». C’est un miracle qu’on se soit rendus. Il est maintenant 19h et on veut aller souper
dans un restaurant. Madame Dodeman nous
demande « Avez-vous fait une réservation? » Bien non, on vient juste
d’arriver. « Alors là, ce ne sera pas facile ». Elle fait deux appels
et les deux restaurants sont complets ce soir.
Nous trouvons un restaurant qui fait du catering et nous allons manger sur une table de pique-nique devant la place
centrale.
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Notre premier souper, à la table de pique-nique |
Samedi
matin, après un déjeuner de croissants, pains au chocolat, baguettes et
confitures et un excellent café, nous nous rendons à l’Information touristique
rejoindre notre guide, Jean-Claude Fouchard, qui nous fait visiter l’île en
voiture. Il connaît bien Saint-Pierre
car il fait partie de la 4e génération de Fouchard établie ici. Il y va même d’histoires assez singulières,
comme celle de la guillotine de Saint-Pierre qui n’a servi qu’une fois. Elle
est d’ailleurs exposée au Musée de l’Arche. En février 1889, le tribunal de
Saint-Pierre et Miquelon a jugé deux marins-pêcheurs pour le meurtre de
François Coupard résidant de l’Île-aux-Chiens (maintenant Île-aux-Marins).
Après avoir trop bu, les deux hommes avaient décidé d’aller souper chez la victime.
Furieux de trouver la porte barrée, ils la démolirent. La victime essaya de se
défendre, mais l’un deux lui asséna un coup de couteau dans la poitrine. Le premier mécréant fut condamné aux travaux
forcés et envoyé au bagne de Cayenne, et l’autre fut condamné à la peine
capitale. Le Gouverneur des îles fit
venir une guillotine et un bourreau, mais il n’a obtenu que la guillotine,
laissant le soin aux autorités locales de trouver quelqu’un pour
l’actionner. Le Procureur de la
République obtint l’accord d’un marin-pêcheur, contre une somme de 500 francs,
pour assembler la guillotine et effectuer la tâche de bourreau. En raison de
l’inexpérience de l’exécuteur et de son assistant, il leur fallut un long
moment pour attacher le coupable sur la bascule et le placer sous le couperet. Finalement,
l’exécuteur libéra le mécanisme et le couperet s’abattit. Ce fut la première et la dernière fois qu’un
individu fut condamné à mort à Saint-Pierre et Miquelon. En 1984 que la peine
de mort fut abolie en France.
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La guillotine à St-Pierre |
Les îles
connurent une période de grande prospérité avec la pêche, mais aussi avec la
prohibition. Dans les années 1920, les
États-Unis et le Canada interdirent la fabrication, la vente et l’achat
d’alcool sur leurs territoires. Saint-Pierre et Miquelon étant un territoire
français, n’était pas concerné par ces lois. Aux portes de l’Amérique,
l’archipel devint un lieu privilégié pour y stocker de l’alcool qui rentrait en
contrebande au Canada et aux États-Unis. En 1933, c’est la fin de la prohibition
et la pêche est alors désorganisée. Une période difficile s’ensuit pour
l’archipel. De nos jours, 6 000 personnes vivent sur l’île Saint-Pierre et 600
à l’île Miquelon.
Jean-Claude,
voulant nous permettre de prendre des photos de la ville, se stationne sur le
côté de la route et il s’enlise dans un trou.
Ce sont des photos qui ont failli lui coûter cher.
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Jean-Claude est dans le trouble |
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A St-Pierre, devant le débarcadère du bateau |
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Les salines de Pointe-aux-Canons |
En
après-midi, nous partons à bord du bateau Le Jeune France, pour une croisière
au Cap Percé. Il fait un temps splendide et la mer est calme, Nous voguons
pendant 2 heures 30 vers l’île Langlade où nous pouvons apercevoir une colonie
de macareux moines nichés sur les rochers du grand Colombier. Nous avons aussi
la chance d’apercevoir un grand nombre de rorquals.
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Les minuscules macareux moines sur le rocher |
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Cap Percé |
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Devant St-Pierre |
Après avoir
pris un délicieux souper à la Crêperie du Vieux Port, nous nous rendons au
Fronton où a lieu des parties de pelote basque. Ce soir, il y a beaucoup
d’ambiance, des musiciens et chanteurs sont sur place et les gens chantent et
dansent.
C’est ici que chaque soir, les
gens de St-Pierre se réunissent pour manger et participer à la fête.
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La rue piétonnière à St-Pierre |
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La fête basque au Fronton |
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Ici, on danse |
Dimanche matin,
pendant que
les Saint-Pierrais dorment encore, nous nous rendons au quai afin de prendre le
bateau Le P’tit Gravier pour aller à l’Île-aux-Marins. Avec la rétrocession
définitive des Îles à la France en 1816, 700 personnes s’installent sur cette
île. Au milieu du 19e siècle, l’Île-aux-Chiens (maintenant aux-Marins)
était en majeure partie composée de pêcheurs normands de la Baie du
Mont-Saint-Michel. Les habitants de l’Archipel les surnommaient « les
Pieds Rouges » car ils avaient l’habitude d’aller à la pêche aux
coquillages pieds nus, ce qui donnait à leur peau une coloration rouge
brunâtre. De nos jours, plus personne
n’habite dans l’île en permanence, il n’y a que quelques maisons d’été que les
citoyens de Saint-Pierre rénovent. Une des figures marquantes de l’Île fut
Ernest Patrice, dit Nénesse. Mémoire vivante de l’Île, il savait aussi se faire
conteur pour le plus grand bonheur de tous.
Nous
prenons le bateau à 14h30 pour retourner à Fortune (Terre-Neuve). Nous ne
voyons pas le temps passé en compagnie de Robert et Anne de Longueuil ainsi
que d’un autre couple de québécois. Installés au parc provincial Frenchman’s
Cove, nous passons la soirée au coin du feu avec Anne et Robert. Une nouvelle amitié vient de naître.
C'est aussi Jean-Claude qui m'avait fait faire le tour de l'ile!!! Eh ben...
RépondreSupprimerAvoue que c'est un bout de pays fascinant: l'accent français, les euros, mais la bouffe IGA au supermarché et un Rona.
Julie, j'ai parlé de toi à Jean-Claude et je lui ai donné le nom de ton blogue. Il m'a assuré qu'il irait voir ce que tu as raconté à son sujet. Retrouver la France pour quelques jours valaient vraiment la peine.
RépondreSupprimerMerci de nous instruire sur l'histoire de ce petit coin de France que nous connaissons si mal! Les photos sont superbes, les couleurs des maisons très gaies !
RépondreSupprimerBonne continuation,bises
Catherine et Hugues
Nous avons pensé à vous, Catherine et Hugues, en visitant ce coin de France.
RépondreSupprimerA mettre sue la liste de place a visiter, c'est certain!
RépondreSupprimerOops...sur pas sue. :)
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